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L’électrification intelligente au service de la transition énergétique

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MADEA : Interactions d'échange et ferromagnétisme

Les interactions d'échange ferromagnétiques s'exercent dans les matériaux présentant des atomes dotés d'un moment magnétique permanent. Lorsque les distances entre atomes magnétiques sont suffisamment petites (de l'ordre de l'Angström), donc au sein de la matière condensée, les orbitales électroniques interagissent, donnant lieu à l'état magnétiquement ordonné présenté par les matériaux dits ferromagnétiques.

 

Le matériau ferromagnétique présente une polarisation magnétique même en champ nul, polarisation qualifiée pour cela de spontanée. Celle-ci est la manifestation macroscopique du fait que les moments atomiques ont tendance à s'aligner parallèlement les uns aux autres, réalisant une mise en ordre que l'on peut comparer à la mise en ordre géométrique (cristallisation) caractéristique elle aussi de l'état solide. De la même manière qu'une augmentation de température conduit à la destruction de l'arrangement géométrique (température de fusion), une augmentation de température conduit à la destruction de l'ordre directionnel des moments magnétiques (obtenue à la température de Curie notée Tc) pour laquelle la polarisation spontanée disparaît.

 

L'existence d'une polarisation spontanée confère aux ferromagnétiques (et aux matériaux de comportements macroscopiquement apparentés comme les ferrimagnétiques) des qualités irremplaçables pour les applications. On compte finalement peu d'éléments concernés par ce comportement. Ceux-ci appartiennent aux deux grandes familles que sont les Terres rares (Sm, Pr, Nd...) où les électrons responsables du magnétisme appartiennent à la sous-couche 4f et les métaux de transition (Fe, Ni, Co) où les électrons responsables du magnétisme appartiennent à la sous-couche 3d. Les composés et alliages réalisés à partir de ces deux familles constituent donc la base des matériaux magnétiques utilisés en Electrotechnique.

Interprétation du ferromagnétisme dans le cadre du champ moléculaire

L'énergie d'interaction magnétostatique entre moments magnétiques est bien trop faible au regard de l'énergie thermique kT pour pouvoir imposer l'alignement des moments magnétiques caractéristique du ferromagnétisme. En fait, l'interaction responsable est d'origine électrostatique et liée au recouvrement des orbitales électroniques entre atomes voisins. Cette interaction donne lieu à une énergie dite d'échange entre les moments cinétiques de spins, et se présente sous la forme :

Si et Sj désignent les moments de Spins magnétiques associés aux deux atomes, Jij désignant l'intégrale d'échange entre les atomes i et j. En fonction de la distance entre atomes, Jij présente un caractère oscillant centré sur la valeur nulle et d'une façon générale, la valeur de Jij décroît vite avec la distance, de sorte que l'énergie d'échange ne s'exerce en première approximation qu'entre atomes voisins, son signe déterminant la nature de la loi de comportement de la substance : positive, Jij détermine le comportement ferromagnétique ; négative, Jij détermine le comportement antiferromagnétique qu'on ne détaillera pas.

On peut proposer une alternative simplifiée à la formulation précédente en raisonnant sur le cas d'une substance composée d'un seul élément magnétique. Le facteur intégrale d'échange est le même pour toutes les paires d'atomes proches voisins et ne sera plus indicé. Par ailleurs, les moments magnétiques i et j portés par les atomes étant eux-mêmes étroitement liés aux moments de Spins i et j, on exprimera finalement l'énergie d'interaction sous la forme

MADEA : Olivier Equation 23

On obtient alors l'énergie d'un moment magnétique i plongé dans un champ d'induction appliqué e et entouré de Z proches voisins de moments magnétiques j , 1<j<Z :

MADEA : Olivier Equation 24

Dans l'approximation du champ moléculaire on fait l'hypothèse que  MADEA : Olivier Equation 25 (moyenne prise sur les Z voisins de i) est identique à la valeur moyenne  MADEA : Olivier Equation 26 prise sur tout le cristal.

En notant : MADEA : Olivier Equation 27

N désigne le nombre d'atomes porteurs de moments par unité de volume, on obtient :

MADEA : Olivier Equation 28

MADEA : Olivier Equation 29

Tout se passe comme si le moment mi voyait en permanence, outre le champ appliqué Ba, un champ interne  MADEA : Olivier Equation 30 proportionnel à la polarisation du matériau. C'est ce champ interne que Pierre Weiss a appelé le champ moléculaire,  MADEA : Olivier Equation 31 étant le coefficient de champ moléculaire.

Comportement thermique des ferromagnétiques

La configuration d'équilibre des moments magnétiques est celle qui minimise l'énergie libre F = U-TS,  où T désigne la température absolue, U l'énergie interne du système et S son entropie. Dans l'état d'énergie libre minimale, la répartition des moments obéit à une statistique de Maxwell-Boltzmann. En physique classique, où toutes les orientations des moments atomiques sont possibles (0<q<p), la loi de répartition de l'écart angulaire  MADEA : Olivier Equation 45 entre l'orientation des moments et le champ appliqué est régi par une densité de probabilité:
MADEA : Olivier Equation 32

k=1,3807.10-23 J/°  désigne la  constante de Boltzmann et m0 l'amplitude du moment atomique. On obtient une polarisation d'amplitude réduite :

MADEA : Olivier Equation 33

où  MADEA : Olivier Equation 34

désigne  la polarisation spontanée correspondant à l'alignement de tous les moments individuels, situation observée en l'absence d'agitation thermique, donc à T = 0 °K. En posant MADEA : Olivier Equation 35 , on obtient finalement la relation :

MADEA : Olivier Equation 36

Où  MADEA : Olivier Equation 37 désigne la fonction de Langevin

On peut également exprimer Jr en fonction de x, soit :

MADEA : Olivier Equation 38

On obtient ainsi une deuxième relation qui, conjuguée à la loi Jr=L(x), permet d'établir la valeur de la polarisation pour un champ Ba et une température donnés. L'observation d'une polarisation spontanée (donc pour Ba=0), matérialisée par le point d'intersection P de la figure 1, n'est possible que si la pente de la droite :

MADEA : Olivier Equation 39

est inférieure à 1/3 (pente initiale de la fonction de Langevin), de sorte que la température de Curie vérifie:

MADEA : Olivier Equation 40

Cette relation exprime que la température de Curie est directement reliée à la force des interactions d'échange.
MADEA : Polarisation spontanée dans un ferromagnétique (Langevin
Figure 1 : Détermination graphique de la polarisation spontanée dans un ferromagnétique

Remarques

Une approche plus complète consiste à tenir compte de la quantification des orientations des moments atomiques justifiées par la mécanique quantique. Il faut alors remplacer dans la fonction de Langevin par une fonction de Brillouin. Celle-ci est paramétrée par le nombre quantique J, directement lié à la valeur du moment atomique, et s'exprime selon :

 

MADEA : Olivier Equation 41

 

La température de Curie s'exprime alors plus exactement sous la forme

MADEA : Olivier Equation 42

où :  MADEA : Olivier Equation 43

désigne le moment effectif. La philosophie du calcul et les ordres de grandeur restent inchangés par rapport à l'approche classique.

Le modèle de Weiss que l'on vient de décrire s'applique à priori pour des matériaux où les moments magnétiques sont localisés sur les atomes, ce qui est le cas des éléments de Terres rares mais n'est pas le cas des éléments de transition 3d (Fer, Ni, Co) à l'état métallique, caractérisés par un magnétisme itinérant et pour lesquels des modèles plus sophistiqués sont requis. On constate cependant que la théorie du champ moléculaire de Weiss donne des résultats très corrects pour le Nickel, le Cobalt et le Fer (cf figure 2), avec une courbe calculée basée sur une fonction de Brillouin  MADEA : Olivier Equation 44 qui suggère que comme dans les composés ioniques, on a affaire à un blocage du moment orbital.

MADEA : Polarisation vis-à-vis de la température du Nickel

Figure 2 : Evolution de la polarisation spontanée avec la température dans le cas du Nickel ( J0 = 0.64 T, Tc = 631 °K).  La courbe correspond à la formulation théorique, les points aux relevés expérimentaux


 

mise à jour le 22 novembre 2018

Université Grenoble Alpes